samedi 3 décembre 2011

Le réveil de l'ours russe

La fin de l'empire soviétique en décembre 1991 - il y a déjà 20 ans - a laissé la place à la seule super puissance américaine et entraîné l'hibernation forcée des rêves de puissance russe. Après quelques années de léthargie, la diplomatie russe semble s'être décomplexée lui permettant de retrouver un rôle dans les affaires du monde.

La descente aux enfers

Après le référendum de décembre 1991 où les Ukrainiens se déclaraient massivement favorables à l'indépendance - les Russes vivant en Ukraine compris - Mikhael Gorbatchev n'a pas eu d'autre choix que de constater la fin de l'empire construit par Lénine et Staline. Empétrée dans les difficultés économiques et la volonté d'indépendance de nombreuses régions de la fédération, la Russie est alors trop occupée à lutter pour sa survie pour penser à peser dans la diplomatie mondiale. Elle vit alors ce qu'elle considère longtemps comme une suite d'humiliation. En effet, libérés du joug soviétique, les pays d'Europe de l'Est se rapprochent massivement de l'occident en cherchant l'intégration au sein de l'Union Européenne ou en frappant à la porte de l'OTAN. Pour stopper l'hémorragie indépendantiste, la Russie de Boris Eltsine décide d'intervenir en Tchétchénie en 1994. Après un bombardement massif et la prise de la capitale Grozny, les troupes russes sont confrontées à une résistance féroce qui voit les rebelles tchétchènes reprendre la ville et entraîner le retrait russe en août 1996.


Grozny - crédit inconnu



Lorsque la crise yougoslave se transforme en guerre, la Russie ne peut empêcher l'intervention américaine qui condamne ses cousins slaves de Serbie. le schéma se reproduit en 1999 lors de la scission du Kosovo bien que cette fois les Russes montrent davantage de résistance en envoyant un contingent sur place et en suspendant sa coopération avec l'OTAN. Cela ne suffit pas à influer sur l'issue du conflit et la Serbie est une nouvelle fois contrainte par la communauté internationale de céder.

les premiers signes du réveil

l'arrivée de Vladimir Poutine coïncide avec les premiers sursauts de la puissance russe. En 1999, il décide d'intervenir à nouveau en Tchétchénie après plusieurs attentats. Bien que les forces russes connaissent à nouveau de grandes difficultés, elles parviennent à reprendre Grozny en février 2000. Dans cette opération, la Russie parvient à installer au pouvoir des hommes qui lui sont inféodés tel que Ramzan Kadirov sans se préoccuper des faibles remontrances internationales.
L'amélioration de la situation économique à partir de 1998 favorise la prise de parole russe. Forte de ses réserves gazières et pétrolières, la Russie dispose d'un avantage économique qui croit au même rythme que le besoin de ces matières premières. cela fait dire à M. Poutine que Gazprom est un puissant levier d'influence économique et politique sur les autres pays. Il n'hésite d'ailleurs pas à utiliser cette force dans ses relations avec l'Ukraine mais aussi l'Europe qui dépend largement des exportations russes.

Désinhibition et retour au statut de superpuissance?

2008 marque le tournant géostratégique pour la Russie. L'Ukraine et la Géorgie cherche alors à rejoindre l'OTAN et les Etats-Unis ne tentent pas de les en dissuader. Les Russes, estimant que le cas de ces pays ne pouvait être le même que la Pologne ou l'Estonie, préviennent qu'ils ne laisseront pas ces adhésions se faire. Après plusieurs esclandres diplomatiques, la Russie décide d'intervenir militairement en Géorgie prétextant de protéger ses citoyens abkhazes et Sud-Ossètes. Après quatre jours d'intervention, Medvedev, estimant les objectifs atteints, stoppe l'armée. Il décide de la laisser sur place pour garantir la paix. Cette opération est un signal fort lancé aux occidentaux: la Russie peut à nouveau dire non et faire respecter son avis.


crédit: deesillustration.com
 
Après avoir fait sauter un verrou psychologique, la Russie cherche à trouver sa puissance d'antan. Pour cela, elle fait le choix de moderniser sa défense et à s'équiper d'outils de projection tels que les quatre BPC de type Mistral commandés à la France. Cela doit l'aider à faire valoir ce qu'elle considère comme ses droits, notamment dans l'Arctique où les réserves en matière première entraînent d'ores et déjà un accroissement des tensions. Le gouvernement russe n'hésite d'ailleurs plus à montrer sa force comme le montre les différentes annoncent militaires autour de cet enjeu - création de deux brigades pour l'Arctique, nouveaux sous-marins, modernisation des brise-glaces, etc.
La gestion de la crise en Syrie est un autre exemple de la diplomatie décomplexée russe. Opposée à une quelconque intervention occidentale, elle joue de son véto au conseil de sécurité à l'ONU pour l'empêcher. Et pour appuyer cette position, la Russie a décidé de l'envoi d'un groupe aéronaval envoyant ainsi un nouveau signal fort.
Enfin, face à la volonté américaine persistante de créer un bouclier anti-missiles en Europe, la Russie menace de répondre par la mise en place d'un système propre, comme aux plus belles heures de la guerre froide.


BPC Mistral - crédit: Theatrum Belli


Pendant que les Etats-Unis connaissent un déclin relatif de leur domination géopolitique comme l'écrit Stéphane Taillat , la Russie affirme ses positions et s'inscrit comme prétendant au statut de super puissance. Signe - anecdotique? - de son poids géopolitique croissant, 50 000 serbes du Kosovo ont fait une demande pour obtenir la nationalité russe. Ils considèrent en effet que seule la Russie peut dorénavant leur permettre d'atteindre leur revendication face aux occidentaux.

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