mercredi 18 avril 2012

Guide du bon usage des médias sociaux, communication opérationnelle et lien armée-nation


Le 5 avril 2012, le ministère de la défense via la délégation à l’information et à la communication de la défense a mis en ligne le guide du bon usage des médias sociaux. L’annonce de cette diffusion a été plutôt bien relayée par les différents médias intéressés par le domaine de la défense non sans formuler un certain nombre de critiques ; la principale demeurant l’arrivée tardive de ce guide au regard de ce que le département de la défense américain avait déjà réalisé depuis bien longtemps. Certes, cette réflexion écrite aurait pu déboucher plus tôt mais il faut tout de même préciser que l’institution n’a pas attendu ce guide pour sensibiliser ses hommes quant à l’usage de ces réseaux sociaux. Conscient, des risques liés à une mauvaise utilisation des nouvelles technologies de nombreuses unités ont réalisé des informations sur celles-ci et notamment avant des départs en opération pour éviter la divulgation d’opérations ou encore l’effet du caporal stratégique. La parution aujourd'hui de photographies montrant des soldats américains posant avec des "restes" d'insurgés est un des plus récents exemples, l'impact de ce type d'image est désastreux et met à mal l'excellent travail effectué sur le terrain durant de longs mois.



La démarche de ce guide est néanmoins vertueuse puisqu’il s’agit non pas d’interdire ou de réglementer (ce qui s’avère extrêmement compliqué) l’usage des réseaux sociaux par les militaires mais bien de les aider dans leur pratique individuelle comme institutionnelle à se poser les bonnes questions avant de publier sur internet où le droit à l’oubli n’est qu’illusion. Certains ont également pu trouver ce guide simpliste mais la population cible étant si hétérogène – du soldat au général en passant par l’organisme ou la famille du militaire – qu’il est bien difficile de rentrer davantage dans la technique.
Au final, les prescriptions souvent génériques du guide du bon usage des réseaux sociaux font appel au bon sens et à la responsabilité des individus. Si le métier militaire possède des spécificités et notamment le devoir de réserve et l’obligation de discrétion, la plupart des conseils peuvent s’appliquer au citoyen utilisant ces mêmes réseaux au quotidien.

Je choisis l’option défensive

La réalisation de ce guide ainsi que les différents sites, pages Facebook, comptes Twitter etc. du ministère de la défense démontre que ce dernier a pris la mesure de l’importance des réseaux sociaux. Cependant, il semble que les armées s'orientent davantage sur une démarche défensive - voire craintive - de peur sans doute de faire des erreurs pourtant déjà commises comme le souligne Jean-Marc Tanguy sur son blog: le guide du faites ce que je dis pas ce que je fais.
Et pourtant, les nouvelles technologies offrent des opportunités à moindre coût pour la communication opérationnelle car dans la bataille sur les perceptions l’ennemi, même au fin fond de l’Afghanistan, ne doit pas être sous estimé. Les Talibans usent des forums et des réseaux sociaux pour mettre en exergue leur action comme ce fut encore le cas lors des attaques coordonnées de dimanche dernier. Depuis quelques mois, L’ISAF s’est adaptée en contrant les informations données par les insurgés notamment sur Twitter. Cette réactivité fait encore défaut aux organismes de la défense ainsi alors qu’un correspondant de la BBC annonçait que le camp Warehouse était attaqué et que les soldats français en charge de sa protection faisait le coup de feu (pendant plus de deux heures tout de même), il fut impossible d’obtenir des informations du ministère de la défense avant la toute fin de journée et ce malgré la demande réitérée de journalistes tels que Philippe Chapleau de Ouest France. 
Bien évidemment, il s'agit d'éviter de donner des informations non vérifiées ou qui pourraient inquiéter les familles mais bien de maîtriser cette information afin d'éviter de possibles extrapolations.


Bien sur internet bien dans sa ville


Pour obtenir cette réactivité en opération, il est nécessaire de se préparer dès la base arrière. En effet, une audience (abonnés, followers, etc.) ne se crée pas du jour au lendemain, il est donc nécessaire de développer la présence sur les réseaux sociaux dès que possible. Cela est néanmoins facilité par la demande réelle pour les comptes d’organismes de défense comme le prouve le nombre d'abonné toujours croissant aux pages ou compte de la défense. Chaque unité, régiment etc. pourrait développer sa page Facebook ou son compte Twitter pour parler de ses actions, son rôle, sa place dans la ville au quotidien. Au moment où l’on estime le lien armée nation de plus en plus ténu, cette démarche simple pourrait concourir à son renforcement sans demander un investissement matériel et humain exhorbitant. Cette audience "captive" pourra ensuite suivre le régiment de sa ville lorsqu'il sera en opération, témoignant de son action et participant ainsi à la compréhension de l'intervention française. 

crédit Defense.gouv.fr

Après avoir rédigé ce guide, la DICOD et le ministère de la défense pourrait donc se pencher sur un guide interne au profit de la communication opérationnelle pour que cette dernière utilise au mieux les opportunités données par les réseaux sociaux au profit des forces armées, "n'ayez pas peur"!

A lire également, dans le même esprit et plus complet le billet de Mars Attaque:

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